Ils se marièrent et eurent deux enfants

Deux ans d'études après le bac, je suis presque... institutrice. Mon rêve enfin réalisé.

Toute à la joie d'avoir en septembre ma première vraie classe, je décide de faire une colonie de vacances en juillet. J'avais besoin de gagner quelques francs pour découvrir la Corse en août mais pas trop envie de m'occuper d'enfants avant ma rentrée. Je choisis d'aller dans les Vosges faire une colonie de vacances de la ville de Vitry-sur-Seine, région parisienne. Et mon job pour un mois ... lingère! Et oui, moi qui transforme très facilement les pulls de marque de ma fille en habit de poupée, je suis chargée du linge d'une centaine de personnes, enfants et personnel de service inclus.

Mon Dieu! D'ailleurs je n'ai pas manqué à ma réputation, m'attirant la rancoeur éternelle du Chef. Il n'a pas supporté que son pantalon de travail à petits carreaux bleus et blancs devienne, après lavage, un pantalon à carreaux violets et roses très fashion! Que voulez-vous, je le comprends! Mais revenons au début, la colonie de vacances. J'arrive un jour après tout le monde en gare de Luxeuil.. mais c'est où ça? Retenue à Marseille pour le mariage d'une très bonne copine de l'école Normale je suis arrivée alors que tout le monde était déjà installé. Je me dirige vers le Val d'Ajol département 88 dans les Vosges, comme un pays étranger pour la jeune marseillaise que j’étais. Le directeur, un prof sympathique, vient me chercher à la gare avec une deux Chevaux de la dernière guerre. Ça promet, j’ai sûrement atterri chez des bouseux... Seule marseillaise au milieu de tous ces parisiens... La folie... 

"A un moment donné" je pense dans ma tête, va falloir ouvrir la bouche! 

Avec  la guéguerre Paris/Marseille,  je n’étais pas tranquille.

Chers amis, me voilà 👀👀👀Tous les regards sont braqués sur moi, c'est à la fois flatteur mais un peu gênant quand même. Il faut dire que je suis bronzée, mais vraiment "black"... alors que mes petits camarades de Paris sont blancs comme des lavabos.

- Une marseillaise qui va laver notre linge?

Fou rire naissant des jeunes...

- Enchantée, moi c'est Françoise sous-directrice!

- Bonjour, moi c'est Gérard... Je suis dans la même chambre que toi!

- La même chambre??? Ah bon...

Et voilà comment, après 20 jours à partager une chambre, notre  temps libre et nos jours de congé, après des heures de conversations passionnantes et quelques bonnes rigolades, Gérard a réussi à me séduire. Il avait les cheveux longs et des moustaches; on le prenait pour Francis Cabrel... Il a même signé des autographes pour piéger un serveur fan du chanteur, dans un restaurant du Val d'Ajol. Il voyageait avec une vieille Peugeot de la dernière guerre, couleur prune avec un coffre bleu, très discret... Il trimballait ses vinyls de Led Zeppelin, Bernard Lavillier, Coluche et Soft Machine, dans une malle que nous avons toujours dans le grenier. Il ne ressemblait à aucun des mecs qui me faisaient  rêver jusqu'alors. Il avait déjà bourlingué, vécu de longues histoires d'amour, moi très peu! Huit ans de plus que moi, il avait fait mille métiers et avait vu beaucoup de choses. Moi j'étais très jeune, l'âge de tous les possibles. Nous  avions des conversations interminables, des rêves en commun, des idées de gauche et de révolution et enfin un plaisir immense d'être ensemble. Ce ne fût pas un coup de foudre mais ce fût un coup de cœur. Gérard m'a "piquée au vif" avec des rires, des paroles et des musiques, de la manière la plus inattendue. Le 3 juillet tu te demandes qui est cet énergumène qui va t'empêcher de te déshabiller tranquille dans ta chambre et le 20 juillet, pour la dernière de nos journées de congé, tu te rends compte que tu as devant toi l'homme que tu cherchais, sans le chercher vraiment. C'est incroyable, improbable, mais c'est comme ça qu'on s'est "trouvés". Ma mère dirait: "C'est le destin".

Première fête le 4 avril 1981 avec les amis  parisiens et la famille à Ermont 95

J'ai retrouvé ces photos en rangeant des cartons  jamais vidés. 

Ça fait un drôle d'effet. On ne se voit pas  vieillir! Dans ma tête j'ai encore 22 ans...

Le 25 juillet 1981 à Marseille petit passage à l'église et grande fête avec les marseillais.

Ce sont nos enfants devenus adultes et parents à leur tour qui nous font redescendre sur terre. Et aussi quand on se met à t'appeler Mamie... 

Je ressens une sorte de fierté non dissimulée à la pensée de ces nombreuses années à deux puis à quatre.  Même si on n'est jamais un couple parfait, que tout n'est pas uniformément rose dans le mariage, il faut COMPOSER et ça peut marcher! Pour nous ce fut le cas .

Je réalise maintenant que nous avons eu de la chance. Je ne le dis pas trop parce que monsieur va se la raconter... J'ai touvé un binôme presque parfait, du moins celui qui me convenait. J'espère qu'il dirait la même chose. Mais là c'est compliqué, il ne montre pas ses sentiments. Il préfère garder ça pour lui... Une bavarde et un silencieux. 

Au début,  nous étions partis pour faire "un petit bout de chemin ensemble". En 1er lieu nous avons eu une visée dans l'avenir proche tout en restant raisonnables, et ensuite les années sont passées sans crier gare, vite, vite, vite! 

Nous avons déjà fait un bon bout de chemin. "Et ça continue encore et encore, 🎶 c'est que le début d'accord d'accord 🎶" C'est du Cabrel 😅

See you soon chers amis 🖐